Improprement appelé Randori en Aïkido, le « taninzugake », incarne le plus haut niveau de pratique. En effet, si gérer un opposant est rarement chose aisée, devoir faire face à plusieurs attaquants, simultanément, est une gageure. Exercice difficile devrait rimer avec progrès exponentiels. Qu’en est-il vraiment ?

Le Taninzugake est une pratique pendant laquelle l’Aïkidoka doit « gérer » plusieurs attaquants à la fois. En général, cette étude est appelée Randori. Il s’agit là d’un abus de langage. En effet, Randori est un terme emprunté au Judo et ne signifie nullement que l’adepte s’entraîne à faire face à plusieurs partenaires, mais simplement qu’il doit travailler à exprimer les principes du Kata lors d’une situation désordonnée.
Le contexte
En observant les autres arts de combat on se rend rapidement compte que la pratique du Taninzugake est peu courante. Si l’on peut la retrouver en Karaté, elle n’existe généralement pas dans le cadre du combat sportif. Cela tombe sous le sens à partir du moment où l’on comprend que le sport dérive du combat rituel et que son objectif est de mesurer une performance précise. Pour ce faire, il est nécessaire d’isoler un grand nombre de facteurs. C’est pour cela que l’on crée des catégories de poids, d’âge, de genre ou de niveau. Le but est de savoir qui court le plus vite sur une piste dégagée en ayant été prévenu quatre ans à l’avance, pas de savoir qui pourrait survivre à une attaque surprise en utilisant tous les moyens à sa disposition. Cela ne rend pas l’activité sportive plus facile pour autant. Au contraire, le degré d’exigence est très élevé et les performances spectaculaires. Ainsi, on pourrait comparer la pratique sportive (combative ou non) à une formule 1 et la pratique « martiale » à un 4×4. Il est évident que la formule 1 roule plus vite, mais elle ne va pas sur tous les terrains…
À l’activité sportive et à son obligation de moyens (respect des règles afin de mesurer le plus objectivement possible la performance), on pourrait opposer l’activité martiale et son obligation de résultats (réussir à survivre). Les stratégies mises en place doivent donc être différentes. Dans un contexte martial, il est ainsi logique d’attaquer quelqu’un à plusieurs et ce afin d’augmenter ses chances de dénouement positif, mais aussi de diminuer le risque encouru. Ainsi, la simple présence du Taninzugake en Aïkido témoigne, si cela était encore à démontrer, de la non appartenance de notre discipline au monde du sport.
L’asymétrie
La nature profonde de l’Aïkido est donc de proposer des outils pour gérer une situation asymétrique. En conséquence de quoi il est extérieurement difficile de comparer le niveau de deux adeptes. En effet, leurs manières de résoudre les mêmes problèmes peuvent différer, notamment à cause de leurs gabarits et personnalités. C’est très probablement pour cela que l’on dit que se comparer dans les arts martiaux ne fait pas vraiment sens. Si cet argument peut sembler vrai il mérite d’être affiné. En effet, ne pas vouloir se comparer ne provient pas d’un noble désir chevaleresque et humaniste ! Cela est dû à une impossibilité logique !
Il est évident qu’on ne peut mesurer la capacité martiale d’un frêle jeune homme à l’aune de celle d’un pilier de Rugby simplement en confrontant leurs gabarits. Leurs manières de résoudre un combat risquent d’être très différentes. Évaluer leurs niveaux respectifs est d’autant plus difficile que la « situation réelle » ne se produira probablement jamais, et que si par hasard elle arrivait elle serait différente pour chacun d’eux et donc incomparable. En revanche, un œil avisé saura voir lequel des deux incarne le mieux les principes nécessaires à sa survie.

Le combat non accepté
Plaçons-nous à présent du côté de la personne attaquée. Si l’on voit surgir plusieurs personnes armées à un moment où l’on n’est pas préparé, il est plus sage de refuser la confrontation et de partir en courant.
Bien sûr les arts martiaux consistent à apprendre à combattre lorsqu’on ne peut pas fuir. De fait, que l’on fuie ou que l’on combatte, le plus prudent est de refuser la confrontation : les risques sont trop grands !
Pascal Krieger l’explique très clairement dans « La voie du bâton ». Originellement l’art martial est mortel : soit l’autre meurt, soit c’est vous, soit vous mourrez tous les deux. Vous pratiquez pour valoriser 33% de chance de survie… Qui peut vouloir aller à la confrontation avec des statistiques aussi défavorables ? Personne. Par conséquent il ne s’agit pas de combat accepté. L’adepte refuse la confrontation, car il comprend les enjeux sous-jacents. Ce faisant, la géométrie du combat, si ce dernier a lieu, va être impactée par ce refus de combattre. Ainsi, on ne s’approchera pas pour délivrer un coup afin de marquer un point avant de repartir dans son coin comme on pourrait le faire en sport. Si contact il y a, celui-ci doit être décisif de manière à résoudre rapidement le problème.
Pédagogie
Forts de ces considérations nous pouvons à présent songer à comment mettre en place un contexte d’étude qui soit favorable pour l’élève, sans pour autant nous éloigner du contexte originel de notre étude.
Il est évident que si le stress est trop élevé, et c’est souvent le cas lorsque plusieurs personnes fondent sur vous, l’élève n’a pas la possibilité de développer d’autres moyens d’agir : il est généralement réduit à utiliser ce qu’il sait déjà faire. Ce faisant, il n’apprend pas, il restitue simplement.
A contrario, si la pression n’est pas suffisante l’élève s’endort ou peut mettre en place des stratégies qui ne fonctionneraient pas dans un contexte de combat « ultime ».
D’une part, il s’agit de trouver un équilibre entre trop et pas assez de stress, d’autre part il faut différencier phases d’apprentissage et phases de test. N’oublions pas que trop de stress peut être aussi délétère que pas assez. Dans le premier cas si l’élève se décourage il peut être amené à arrêter la pratique et dans le second cas si l’élève s’ennuie… il peut également être amené à arrêter la pratique !
Il est donc crucial de mettre en place des étapes graduelles de formation. À ce titre un observateur extérieur, qui n’est pas émotionnellement pris par la situation, est fondamental. Avec sa vision d’ensemble cet observateur pourra ainsi dire aux attaquants d’accélérer, de ralentir, d’accepter la chute, etc. tout en conseillant Tori si besoin est.
Le rythme des attaques
Un problème couramment rencontré lors de la formation est que le rythme des attaques est trop lent. Cela amène Tori à traiter un partenaire après l’autre. De fait, cela ne change pas beaucoup de la pratique avec un seul partenaire. Bien entendu l’idéal est d’être capable de gérer la situation comme s’il n’y avait qu’une seule personne, mais cela doit être rendu possible par les capacités de Tori, pas grâce à la lenteur des Uke.
Ainsi, on peut généralement considérer que trois Uke sont suffisants pour avoir un rythme d’attaques satisfaisant. Au-delà, on peut rapidement constaterque les attaquants se gênent entre eux. Il est également préférable d’avoir plutôt trois partenaires que deux car ils seront moins vite fatigués et plus à même de percevoir dans quel état se trouve Tori. Ce faisant ils pourront moduler leurs actions afin d’éviter de rentrer dans un état de stress contre-productif, où ils pourraient également prendre le risque de se blesser.
On prendra garde à ce que les Uke n’attendent pas que Tori ait fini d’exécuter sa technique pour l’attaquer. Cela est souvent difficile pour les Aïkidokas qui attendent régulièrement que Tori soit disponible avant de l’attaquer. Ce qui finit par développer chez Tori l’incapacité de répondre lorsqu’il n’est pas « fin prêt »…
Si les trois Uke réussissent à attaquer simultanément, alors l’exercice est effectué correctement. On modulera cette difficulté en allant plus lentement, mais en aucun cas en changeant le temps des attaques les unes par rapport aux autres. L’objectif est de jouer une partition avec des doubles croches. Si l’on n’y arrive pas tout de suite, il suffit d’abaisser le tempo. Mais en aucun cas ne transforme-t-on les doubles croches en noires ou en blanches.
Comment débuter ?
L’attaque la plus répandue pour travailler le Taninzugake est Ryo Kata Dori. Il est vraisemblable que celle-ci a été mise en place pour deux raisons principales. La première est quelle est symétrique. Cela facilite à la fois le travail de Uke, mais également celui de Tori qui doit gérer une incertitude moindre : il peut choisir d’aller à gauche ou à droite. Le deuxième intérêt de cette double saisie d’épaule est justement qu’il s’agit d’une saisie. Par conséquent elle est, a priori, perçue comme moins dangereuse pour Tori. Cela peut être appréciable dans un contexte où son niveau de performance risque de décliner.
Malheureusement, ces caractéristiques peuvent également être vues comme contre-productives. Ainsi il me semble que choisir une saisie pour débuter l’apprentissage du Taninzugake est au fond la moins bonne des décisions que l’on puisse prendre.
D’une part parce qu’une saisie seule (sans frappe ou projection consécutive) n’est pas une véritable attaque, d’autre part parce que la saisie amène souvent une sorte de passivité de la part de Uke, ou pire un blocage. Ces deux réactions ralentissent les actions de Tori et du coup amoindrissent ses chances de succès pendant son apprentissage. En effet, les autres partenaires vont vite arriver et Tori risque de se trouver rapidement submergé.
Ce qui est tragique c’est qu’en « situation réelle » Tori aurait la possibilité de frapper un Uke qui le bloquerait et que la situation serait ainsi plus facile à régler.
Bien sûr cet écueil devrait être évacué par le professeur, mais celui-ci n’est malheureusement pas toujours disponible. De fait, les pratiquants montent souvent en tension lors du Taninzugake à cause de partenaires qui ne comprennent pas le sens de ce travail.
Ainsi, pour faire un Taninzugake productif, il faut être doublement intelligent. À la fois en tant que Tori, pour ne pas laisser monter le stress lorsqu’on est bloqué par une saisie, mais aussi en tant que Uke, pour comprendre que bloquer Tori par une saisie c’est se mettre en danger. Trop souvent Uke attaque impunément en se sentant faussement en sécurité dans le contexte artificiel du dojo.
C’est pour toutes ces raisons que l’attaque Shomen me semble plus adaptée.
Exploration N° 1 : Les Uke attaquent Shomen, Tori prend contact avec l’attaque avec une ou deux mains, sans la repousser, ni la dévier et se déplace sans jamais faire de pause, ni accélérer. À ce stade aucune technique n’est effectuée.
Objectif : Tori cherche à être continuellement en mouvement pour ne pas devenir une cible immobile facile à toucher. Pour autant il ne doit pas accélérer sinon il atteindra vite unplafond de saturation. Ses déplacements doivent être stratégiques (cf. plus loin).
Explication : Shomen est une attaque invraisemblable en self-defense, mais elle a l’avantage d’obliger Tori à mobiliser son axe, et permet l’esquive à gauche ou à droite. De plus cette attaque est plus lente qu’un Jodan Tsuki par exemple (car sa trajectoire est plus longue) et par conséquent elle laisse le temps à Tori de « voir venir ».
Variante : Tori pratique le même exercice en croisant les bras et en s’interdisant d’avoir un retour proprioceptif avec ses mains. Cela va augmenter sa capacité à percevoir les attaques, ainsi que le pousser à développer sa mobilité.
Des techniques adaptées
Exploration N° 2 : À présent, les trois Uke attaquent Shomen mais Tori peut effectuer des techniques. Le rythme est relativement lent, mais il n’y a pas de pauses dans les actions des Ukes, ni d’accélérations. Cela doit sembler monotone à un observateur extérieur.
Objectif : Le but est de laisser le temps au cerveau de Tori d’évaluer son environnement et de sélectionner la réponse (la technique) la plus appropriée pour se placer avantageusement.
Observation : Il est à peu près évident qu’à un moment donné Tori va recevoir deux Shomen sur la tête simultanément. Cela peut être causé par une mauvaise gestion de l’espace et dans ce cas, aussi paradoxal que cela puisse paraître, Tori a en fait « réussi » l’exercice : il a exploré la contrainte de l’exercice. Il faut échouer pour les bonnes raisons. A contrario, si Tori a eu besoin d’accélérer pour réussir il est passé à côté du cœur du travail, le but étant d’apprendre et non de réussir à tout prix.
Le choix des techniques
Toutefois, il est possible que Tori ait échoué parce que les techniques qu’il a l’habitude de pratiquerse révèlent inopérantes pour le Taninzugake. En effet, la pression temporelle est très forte pendant cet exercice. Il faut donc aller vite. Mais si l’on va vite on peut être amené à augmenter son niveau de stress et perdre ainsi sa capacité de jugement. Il faut trouver un équilibre entre vitesse et discernement. Pour aller vite sans monter dans les tours il faut donc faire le choix de mouvements courts. Cela implique de sélectionner des techniques qui comportent peu de phases et dont les amplitudes sont réduites. Ce constat confirmera que beaucoup de techniques d’Aïkido ont été déshabillées de leurs oripeaux martiaux. La sophistication extrême a donné lieu à des mouvements comportant parfois 4 ou 5 phases ! C’est très lent comparé au mouvement univoque d’une main dans la figure.
Il semble donc préférable de ne pas envisager l’utilisation detechniques « longues » lors d’un Taninzugake. Le problème est que si celles-ci sont régulièrement pratiquées, il y a de fortes chances que ce soient ces dernières qui ressortent en situation de stress…
Penser le catalogue
Cela amène à réfléchir à un autre point : la rationalisation du catalogue. Habituellement un professeur enseigne principalement les techniques qu’il apprécie ou bien celles qu’on lui a présentées comme fondamentales. Mais il est très rare que ce dernier ait fait l’effort de structurer son approche en déterminant selon des critères précis quelles sont les techniques les plus importantes, celles qu’il faudrait travailler la majeure partie du temps. Ainsi travailler principalement Nikyo parce qu’« on aime bien cette technique », alors que dans le système dans lequel on évolue cette technique ne sera utile que sur un faible nombre d’attaques, n’est peut-être pas très judicieux. Souvent ce type de choix est justifié en disant « certes, on ne pourra l’appliquer tel quel, mais les principes que Nikyo contient feront progresser sur d’autres techniques ». Et lorsque des détails sont demandés quant à ces (sacro-saints) principes, l’interlocuteur énumère souvent l’habituel chapelet : Maaï, Shiseï, Zanshin, etc. alors qu’il est évident qu’on retrouve finalement ces notions dans toutes les techniques…
De la même manière que les entraîneurs sportifs étudient la transférabilité, ou non, d’exercices de musculation dans la performance de leurs athlètes, il serait peut-être temps que l’Aïkido explicite plus précisément pourquoi on pratique telle ou telle technique et si oui, ou non, celle-ci permet de développer réellement des aptitudes en combat (ou sur le plan spirituel si c’est l’objet de la pratique en question). À partir d’un tel constat on pourrait choisir d’enseigner préférentiellement ce qui a fait ses preuves pour atteindre les objectifs que l’on se fixe. Bien sûr cela n’empêcherait pas de conserver ce qui est considéré comme « exotique » afin de l’étudier de temps en temps.
Le tennisman ne s’interdit pas de recevoir une balle en plaçant la raquette entre ses jambes. Mais il ne s’y entraîne probablement que fort peu, ou alors pour casser sa routine dont l’essentiel est certainement constitué du coup droit, du revers et du service… Pourquoi ne pas faire de même ?
Le paradoxe de la technique absurde
C’est donc bien le paradoxe suivant qui se présente. Plus une technique est complexe et difficile, plus nous passons de temps à l’apprendre, et donc à la pratiquer, et donc à l’ancrer. Là où le bât blesse, c’est que si cette technique est complexe, elle a de fortes chances de rater, voire d’être en fait inefficace. Ainsi, si l’on n’y prend pas garde on ancre en soi des techniques qui pourraient se révéler inefficaces. Pourquoi ne pas réfléchir, rationnellement, à ce qui a le plus de chances de fonctionner et n’ancrer que cela dans son corps ?
Exploration N° 3 : L’exercice reste le même que précédemment (trois Uke attaquent Shomen, Tori réalise des techniques), mais Tori sélectionne préalablement 4 techniques aussi brèves que possible (exemple : ikkyo ura, kokyu nage, main au visage, etc.) lui permettant d’aller à gauche ou à droite d’une attaque.
Objectif : Tori se doit d’être le plus calme possible, il doit marcher continuellement, sans s’arrêter, tout en réalisant ses techniques.
Observation : Il est fort probable que le Taninzugake s’améliorera d’un seul coup, par cette simple sélection des techniques appropriées.
Vers la complexité
On peut ensuite décliner ce déroulé à volonté en choisissant d’autres attaques (toujours des frappes) : Yokomen, Chudan Tsuki, Jodan Tsuki, Mae geri, etc.
Puis, dans un second temps on va commencer à créer de l’incertitude en faisant travailler aléatoirement deux attaques qui vont obliger le pratiquant à être capable de gérer des frappes qui arrivent sur son axe ou latéralement (Yokomen et Shomen), en haut ou en bas (Shomen et Tsuki), etc.
L’idée est de choisir des attaques qui diffèrent par un ou deux paramètres au maximum (généralement la trajectoire ou la hauteur de cible), pour que Tori apprenne à identifier les éléments pertinents, nécessaires à sa prise de décision. Cette légère réduction de l’incertitude crée de la progressivité qui est source d’amélioration.
Stratégies
À présent, il est nécessaire que Tori établisse une stratégie claire. Comme l’a évoqué Musashi, l’idéal est de pouvoir traiter les opposants les uns après les autres. Pour cela il faut réussir à les mettre en ligne. Le problème est que cette ligne va constamment bouger puisque les attaquants placés derrière vont s’efforcer de contourner le premier Uke pour atteindre Tori. Le but des Uke sera d’encercler Tori alors que le but de Tori sera d’aligner les Uke.
Exploration N° 4 : Tori reprend l’exploration N° 1 (prendre contact avec Shomen et se déplacer en esquivant), mais les Uke débutent le Taninzugake en étant en ligne les uns derrière les autres. Le but de Tori sera de conserver cette structure qui lui est avantageuse.
Explication : Il est plus facile de conserver quelque chose que de l’obtenir. Par conséquent débuter ainsi en ligne aidera Tori à conserver cette situation favorable et lui permettra plus facilement de comprendre son avantage que s’il devait le créer.
Exploration N° 5 : Exercice similaire, mais à présent les Uke sont en ligne face à Tori. La difficulté est croissante. Il faudra sûrement veiller à adapter la vitesse.
Exploration N° 6 : Même exercice, mais, au départ, Tori est encerclé.
La géométrie de la situation initiale est un moyen de faire varier la difficulté de l’exercice, mais aussi de faire comprendre, implicitement, à l’élève quelle est la stratégie la plus intéressante à d’adopter.
Coordination des attaquants
Pour l’instant nous n’avons pas parlé de la coordination des attaquants entre eux.
L’intérêt des Uke est de conserver l’avantage d’être en groupe. Pour cela il ne faut pas qu’ils se dispersent. La stratégie qui semble la plus logique consiste à se rapprocher le plus possible de Tori pour fondre simultanément sur lui. Si cela arrive il est indispensable que Tori prenne l’initiative et choisisse un des attaquants (généralement situé à l’extérieur) pour fondre sur lui. L’idéal pour les trois attaquants serait que deux parviennent à saisir Tori pendant que le troisième « s’occupera » de lui. Ainsi, la saisie pourra prendre tout son sens. Par conséquent Tori veut à tout prix éviter d’être saisi, le risque étant trop grand d’être bloqué et donc ralenti car, au final, le seul avantage de Tori est qu’il est seul et peut ainsi optimiser sa mobilité, contrairement aux Uke qui peuvent se gêner mutuellement.
ExplorationN° 7 : Cette dernière exploration va consister pour les Uke à établir une stratégie avant de passer à l’action. Cela peut être de saisir Tori pour l’immobiliser, de l’attaquer simultanément à des hauteurs différentes, de le feinter, etc. Bien entendu cela doit être mené avec bienveillance et dans une perspective de progrès mutuels.
Objectif : Le but pour Tori est d’être capable de lire le plus rapidement possible quel type de stratégie est mis en place par les Uke. Il y a de fortes chances qu’il ne réussisse pas à se sortir de la situation, mais petit à petit il apprendra à la lire et à repérer les indices qui l’amèneront à choisir des solutions fonctionnelles.
Enfin, dans une perspective plus ludique on peut envisager de pratiquer un Taninzugake avec tous les membres du dojo simultanément. Chacun pouvant être alternativement Uke et Tori, l’adepte développe une conscience plus vaste de son environnement et perçoit à quel point il nécessaire de rester dans la prise d’initiative, quelque soit le rôle qu’il joue.
Pour conclure, force est de constater que, à l’instar d’autres modes d’étude, tels que les saisies ou les attaques arrières, la pratique avec plusieurs attaquants met en lumière de fortes problématiques. Il est intéressant de noter que c’est bien souvent dans ces études « secondaires » que l’on est susceptible de trouver des indices permettant de donner du sens au reste de notre travail de façon stimulante.
Cet article est initialement paru dans Self&Dragon Magazine Spécial Aïkido #4


