La force de l’Aïkido c’est sa faiblesse

Photo cadeau de Pierre Fissier 😉

Ne vous est-il jamais arrivé de considérer, en regardant autour de vous, que l’Aïkido n’était pas une discipline, mais plutôt une porte d’entrée ?

Il est courant de dire que dans les disciplines martiales il y a beaucoup d’appelés, mais peu d’élus. Pour autant, il ne me semble pas juste de dire que quelqu’un qui a un jour été Aïkidoka cesse de l’être simplement parce qu’il ne pratique plus. J’ai rencontré nombre d’adeptes qui continuent à penser et à vivre l’Aïkido même s’ils ne foulent plus les tatamis.

Cela est intriguant. Pourquoi ont-ils arrêté s’ils y pensent toujours ?

Il me semble donc vraisemblable de dire que les questions que pose notre pratique les ont touché, mais que les réponses apportées ne convenaient pas.

Et c’est à ce titre que notre discipline peut être considérée comme une porte d’entrée. Une porte d’entrée vers des interrogations et vers d’autres disciplines.

Pourquoi et comment ?

Il est maintenant de notoriété publique que l’Aïkido descend quasi exclusivement du Daïto Ryu de Takeda Sokaku. On sait également que cette école n’est pas un Koryu au sens strict puisqu’elle comporte un trop grand nombre de techniques et que celles-ci n’ont pas été organisées entre elles par leur fondateur, mais par ses élèves. Pour rappel certains Koryu ne comportent qu’une douzaine de techniques. Ce faible nombre permet de les intégrer pleinement et de ne pas être figé lorsque l’on doit choisir quelle réponse apporter à une attaque surprise.

Si l’on ajoute à cela le fait que l’organisation du cursus moderne de l’Aïkido émane non pas du fondateur, mais de son fils Kisshomaru ainsi que de Toheï Koïchi, on aboutit rapidement à la conclusion que l’organisation de notre art n’est pas celui d’un Koryu.

Il suffit d’ailleurs d’une année de pratique pour se rendre compte que les techniques ne sont pas enseignées dans un ordre facilitant l’apprentissage : tout est anarchique. Le système peut sembler avoir été pensé (notamment avec la nomenclature ikkyo, nikyo, sankyo, etc.), mais cela reste très superficiel.

Dommage pour nous serais-je tenté de dire…

Pour autant, tout aspirant Budoka doit pouvoir transformer les contraintes en opportunités.

Cette absence de réponses claires nous oblige à nous interroger et à chercher par nous-même. Ainsi nombre de pratiquants se mettent à se passionner pour l’histoire du Japon afin de comprendre pourquoi nous effectuons par exemple les techniques à genoux. Cela ne résout pas l’absurdité de cette pratique, telle que nous l’effectuons aujourd’hui, mais cela donne accès à un raisonnement qui n’aurait peut-être pas éclos autrement.

Que la préparation, l’efficacité, la spiritualité, l’usage de la force, l’énergie, la pacification des conflits nous apparaissent douteux et nous avons tôt fait de nous emparer d’autres outils pour chercher à combler les manques perçus dans notre art.

C’est cela la force de l’Aïkido : son incohérence. Cette incohérence nous oblige à chercher et à nous dépasser. Cet outil incomplet nous oblige à remplir les blancs nous mêmes et ainsi nous grandissons.

Malheureusement cette absence de sens crée un vide qui peut laisser place à tous les fantasmes…

Mais j’ose espérer que dans la majorité des cas elle pousse à la recherche de réponses plutôt qu’à l’adoption de dogmes.

Les réponses que nous trouverons ne seront jamais absolues. Elles nous ramèneront toujours à nous-même. Et c’est bien là le plus difficile : accepter que nous sommes simplement des hommes…


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